A
la fin des années 30,
Salvador Dalí est exclu du mouvement surréaliste (alors
sous la « direction » du poète André Breton),
après plusieurs provocations pro-fascistes.
Le peintre part s’exiler au États-Unis. Lors d’un dîner mondain
organisé par la Warner au cours de l’année 1945, Walt Disney lui
fait part d’un projet sur lequel il travaille à l’époque : un
court-métrage d’animation qu’il veut intituler Destino,
le destin tragique de Chronos, dieu grec du temps, désespérément
amoureux d’une mortelle, sur fond d’une ballade
mexicaine...
Pendant huit mois, chaque matin, le peintre pointe ses moustaches dès 8h30 dans les studios Disney et travaille d’arrache-pied jusqu’au soir en compagnie de John Hench, dessinateur et concepteur chez Disney. Ensemble, ils planchent sur le story-board, Dalí produisant des dizaines et des dizaines de croquis, d’esquisses... Mais les difficultés économiques de l’après-guerre ont fragilisé la compagnie Disney et le projet est finalement abandonné.
De cette collaboration resteront toutefois18 secondes d’animation que Hench montera pour tenter de convaincre Disney, dans un ultime recours, du potentiel du projet. Et qui ont fini par croupir pendant des décennies dans les archives de la compagnie. Jusqu’à ce qu’en 1999, le neveu de Walt Disney exhume le projet et décide de lui donner, quarante ans plus tard, un aboutissement. Sur la base des story-boards laissés en friche par Dalí et avec l’aide de John Hench lui-même, une équipe de 25 experts en animation dirigé par le réalisateur français Dominique Monféry s’est attelé à redonner vie, enfin, à Destino.
Achevé en 2003 et projeté en avant-première lors du festival d’animation d’Annecy, puis dans plusieurs festivals à l’étranger et lors d’expositions consacrées à Dalí, le court-métrage, qui dure environ 7 minutes, n’a toutefois pas connu de sortie commerciale. Mais le film a rapidement trouvé sa place sur Internet, pour le plus grand bonheur des admirateurs des deux génies.